Vous êtes de plus en plus nombreux à vous lancer dans la fabrication d’un levain surtout depuis le 1er confinement : l’envie de faire du pain, et du levain est revenue au coeur de beaucoup de foyers, et c’est une excellente occupation.

En effet, se retrouver face à soi-même, en famille, seul, ou entre amis, nous a forcé quelque part à puiser dans nos ressources intérieures pour soit se sentir rassuré face à une pénurie éventuelle de nourriture de base, soit tout simplement pour s’occuper sainement. Ce n’est pas pour rien que le pain est l’aliment le plus vieux du monde. Cette envie de faire du pain est ancrée dans nos gènes. Et quoi de plus sain que de faire du pain pour se nourrir ou pour nourrir sa famille ?

Mais pour faire du bon pain, digeste, et nourrissant (d’un point de vue nutritionnel), encore faut-il qu’il y ait une fermentation. Sans fermentation, cela serait du pain azyme, sans gout, sans levée, sans transformation du gluten, de l’amidon, bref, indigeste, surtout avec les farines de blés modernes, mais aussi de seigle, d’epeautre… Certains continueront à utiliser de la levure industrielle, plus rapide, plus pratique aussi selon eux, quand d’autres, qui auront commencé leur transition alimentaire, et qui auront pris le temps de comprendre les bienfaits du levain naturel sur la santé, auront décidé de faire leur propre levain.

Faire son propre levain : une idée merveilleuse, mais qui parfois, peu laisser perplexe.

Je recommande à tous d’essayer au moins une fois dans votre vie de faire un levain à partir d’eau et de farine. Cela permet de comprendre le mécanisme du levain, et tout son paradoxe : tellement simple, et pourtant tellement compliqué.

Compliqué déjà à cause des innombrables recettes que l’on trouve : Comment faire son levain, le levain facile, le levain rapide, le levain en 2 jours, le levain en 8 jours, le levain méthode Keyser, ajout de miel, sans miel, avec frigo, sans frigo, farine T150, farine T65….et il y a aussi le levain-levure (pour les plus pressés..). Bref, déjà un parcours du combattant pour se lancer et faire le tri dans toutes ces recettes.

Compliqué ensuite car si votre levain est né (bravo !) ce n’est pas encore tout à fait un vrai « levain »..c’est juste un bouillon de cultures qui commencent à vivre. J’explique un peu plus loin pourquoi.

Mais déjà, comment faire son levain ? rien de plus simple : il faut juste mélanger eau et farine dans des proportions identiques, rafraichir chaque jour du même volume, et laisser fermenter, jusqu’à voir apparaitre des bulles, et une levée. 3 jours, 5 jours, 10 jours, parfois 15 jours et plus. Cela depend de beaucoup de parametres, et chaque levain sera différent, selon la farine, l’eau, les levures et bactéries sur vos mains, dans l’air, etc. Aucune garantie de réussite, ni de succès : un levain de 5 jours peut donner un beau pain, et un levain de 3 ans ne fera pas forcement le même. La différence n’est pas visuelle. Car la levée du pain est assurée par le degagement de CO2 issu de la fermentation alcoolique (donc des levures), et des levures, il y en a toujours au debut, en petit nombre. Elles se develloppent au fur et à mesure que l’on rafraichit. Mais ce qu’on attend d’un levain c’est qu’il y ait surtout des bacteries lactiques. Car toute la différence entre un levain jeune et un levain vieux se trouve dans le ratio levures / bacteries lactiques.

Un levain jeune n’a que très peu de levures et presque aucune bactéries lactiques. Un levain vieux de plusieurs années en possède des millions, et un vrai levain (sans contamination par des levures industrielles) a plus de bacteries lactiques que de levures sauvages.

Voici par exemple la composition de MyLevain :

Bactéries lactiques : 230 000 000 ufc/g

Levures : 11 000 000 ufc/g

Ainsi un levain vieux aura eu le temps de développer une grande quantité de bactéries lactiques, dominantes par rapport aux levures.

Cela a plusieurs conséquences sur le pain :

  • une mie moins aérée (moins de grosses bulles comme avec la levure industrielle) donc un pain plus nourrissant.
  • plus de gout, plus d’aromes (grâce aux bactéries lactiques)
  • plus de conservation (grâce aux bactéries lactiques d’une part, qui agissent sur la structure de l’amidon et retardent son rassissement, mais aussi grâce aux levures, d’autre part, en plus faible nombre que la levure industrielle, donc moins de CO2 et des bulles d’air plus fines. Or moins d’échange d’air donneront moins de sècheresse de la mie).
  • une meilleure digestion (grâce aux bactéries lactiques, qui transforment la structure du gluten, mais aussi les nutriments et vitamines du blé afin de les rendre plus assimilables par l’organisme).

Voilà donc la grande différence entre un levain jeune et un levain vieux, si on compare ses effets sur le pain.

Mais qu’en est-il sur ses facultés de conservation, de réveil, bref, d’utilisation ?

En effet, ce que l’on attend de son levain, c’est qu’il se réveille vite, qu’il soit prêt en une ou deux heures juste après son rafraichi, et qu’il se conserve longtemps au frigo et si possible sans le nourrir trop souvent. Est ce possible avec un levain jeune ? La réponse est non.

Un levain jeune demandera du temps pour reveiller après sa sortie du frigo. Il sera capricieux, sa pousse sera souvent faible (à cause de son faible nombre de levures sauvages). Il faudra lui faire beaucoup de rafraichis afin qu’il se renforce dans le temps. Et au niveau de sa capacité à être conservé au frigo, rien ne le garanti non  plus : cela dépendra de la famille de levures, et de la famille de bactéries lactiques : toutes ne réagissent pas pareil au chaud comme au froid.

Enfin et surtout, il a été prouvé dans différentes thèses scientifiques que le levain vieux a une meilleure capacité à se conserver au frigo, à se réveiller vite, et à donner des pains de meilleure qualité (et une excellente conservation). Cela vient principalement du fait que certaines familles de levures sauvages ont la capacité de produire des substances protectrices, comme le Glutathion, et le Tréhalose. Grace à la synthèse de ces éléments, les levures résistent mieux au stress des changements de température, et de conditions de vies extrêmes (au frigo) avec peu de nourriture.

C’est donc pour toutes ces raisons qu’un levain vieux est plus précieux qu’un levain jeune. Il a plus de levures sauvages, plus de bactéries lactiques (donc plus de bienfaits sur la santé grâce aux actions des probiotiques !), il peut se conserver facilement au frigo, et il n’a besoin que de très peu de nourriture pour survivre. Et pour toutes ces raisons, le pain qu’il produira entre vos mains sera exceptionnel.